Michèle Laframboise
Qui suis-je ?
Je suis une ex-savante folle devenue conteuse d’histoires.
Je suis née un 14 juillet, fête des Français, mais à Londres, où mes parents étudiaient alors. Par la suite, j’ai vécu en français, d’abord au Québec, puis en Ontario où j’ai migré en 2003.
J’ai découvert la science-fiction très jeune, en lisant Les robots d’Isaac Asimov, livre trouvé dans la bibliothèque de mon père. J’ai toujours aimé les sciences, j’ai étudié la géographie parce que j’aime la nature et le génie civil pour la protéger. J’étais cependant du genre « savante distraite », j’ai un jour inondé par accident un laboratoire à l’École Polytechnique (il a été reconstruit depuis).
J’ai d’abord raconté des histoires en dessins, mais ma carrière d’autrice de BD n’a pas levé comme un gâteau. Je continue cependant de dessiner pour mon plaisir dans mon blog. En même temps, j’ai commencé à utiliser les mots pour construire mes histoires de l’avenir. J’ai publié plus de 60 histoires courtes dans des revues.
J’ai publié des romans et des BD, mais les petits éditeurs tendaient à tomber en faillite comme ces ponts de cordes dans les films d’aventures… Heureusement que je cours vite !
Mon esprit fantaisiste a mis hors de ma portée les emplois « sérieux », bien assise dans un bureau. À la place, j’ai eu une suite de petits boulots précaires et parfois dangereux. Je me souviens toujours des journées de douze heures, pendant les enquêtes de circulation, où des 18-roues me frôlaient le dos sur une petite route. Lors de ces études de terrain, j’ai aussi porté sur mon dos un lourd appareil GPS sophistiqué duquel émergeaient deux antennes avec une petite soucoupe volante… Ce qui a suscité beaucoup de questions des adultes : « Cherches-tu des Martiens ? » … et des enfants : « Tu cherches un trésor ? ».
Le trésor, j’ai fini par le trouver : ce sont mes histoires, et tous les jeunes et adultes qui les explorent !
Publication au sein de la collection 14/18
Le projet Ithuriel, 2012
Le secret de Paloma, 2021
5 questions à Michèle Laframboise
- Comment l’univers de Sérail vous est-il venu à l’esprit?
Nous vivons ici dans des conditions cent fois meilleures que celles qui prévalent dans les pays pauvres, où les habitants en arrachent pour survivre, ou rêvent de partir. (Pour moi, « pauvre » signifie : ne possède aucun contrôle sur ses moyens d’existence.) J’ai imaginé une planète aux conditions hostiles qui découragent les adultes venus y chercher une meilleure vie, et encore plus les enfants et adolescent.e.s qui n’ont pas, eux, choisi de naître dans ce monde. Et qui subissent une charge émotionnelle intense, juste à cause de ces conditions, et ce, en plus des bouleversements de l’adolescence ! - Quelle est votre source d’inspiration inépuisable ?
La nature, les sciences, l’histoire, et la bêtise tonitruante de quelques humains qui contaminent les médias et détruisent la nature au nom de la «liberté ». C’est souvent une idée « négative » qui me pousse à créer des mondes différents. - Qu’est-ce qui vous a poussée à écrire sur les secrets, de même que sur le poids qu’ils peuvent avoir sur la conscience?
Expérience personnelle, il y a eu des suicides dans ma famille, et aussi, des expériences traumatisantes racontées par des amies longtemps après les faits. Le harcèlement que j’ai vécu moi-même, plus jeune, aux années quand dénoncer un abus n’apportait que des ennuis. Les secrets douloureux qu’on garde au fond de soi font plus de mal que de bien. - Vous animez parfois des ateliers littéraires pour les jeunes, quel aspect de ces rencontres préférez-vous ?
J’aime bien quand je décortique en caricatures les raisons pour lesquelles un roman peut être difficile d’accès. L’âge, les préférences, les thèmes abordés, le style d’écriture, par exemple, un auteur ou autrice pour adultes peut s’étirer sur 200 pages pour mettre en place la situation, tandis que pour intéresser les jeunes, la première page doit accrocher. Je garde en mémoire, comme un trésor, leurs éclats de rire. - Quel est votre rêve ultime, la chose que vous aimeriez à tout prix accomplir dans votre carrière d’écrivaine?
C’est une question à laquelle les réponses changent avec le temps et mon humeur. Je n’ai pas UN rêve ultime, mais plusieurs petites étapes :- Quatre heures libres d’interruption par jour pour écrire.
- Écrire plus vite, pour avoir le temps de lire davantage d’autres auteurs et autrices !
- Continuer de courir jusqu’à 101 ans.
- Corollaire : la santé, et vivre assez longtemps pour être un jour invitée d’honneur à un alon du livre !
- Que ma série La quête de Chaaas, écrite pour des garçons déprimés, émerge de l’océan d’indifférence des médias et soit un jour portée au grand écran.
- Gagner des prix littéraires ? Déjà fait. Enfin, je reste optimiste et je prépare mon discours d’acceptation du prix Nobel de littérature. Bon, le prix Hugo ou Nébula en science-fiction serait bien.
- Mais le plus important : rejoindre des lectrices et lecteurs, parce que j’écris pour partager des expériences, des impressions, des idées, des histoires ! C’est pour cela que j’aime donner des ateliers aux élèves ! J’écris pour consoler, réconforter, encourager, pointer le doigt vers des problèmes d’environnement et de santé mentale, mais aussi pour dessiner des solutions créatives pour l’avenir.
Un conseil pour un futur écrivain ou une future écrivaine ?
Observe le monde, va vers les autres, écoute-les. Persévère. Ne t’enferme pas dans ta tour d’ivoire en attendant l’inspiration.
Quelques anecdotes au sujet du Projet Ithuriel
« Lara est d’abord apparue… en projet de bande dessinée ! J’ai dessiné 22 pages avant de me rendre compte que c’était gourmand en temps ! J’ai commencé à écrire la première version du roman en me disant ʺBof, ce sera plus facile de l’écrire que de le dessiner !ʺ ».
« Le passé de manifestant d’Antoine est en fait le mien, sauf que je n’ai jamais souffert de brutalité. (…) Plusieurs des opinions d’Antoine reflètent les miennes ».
« J’ai lu un poème en public le 15 octobre 2011, sur le site des Indignés de Bay Street, à Toronto. Les trois lignes en exergue du roman sont de moi ! Le poème s’intitule La main invisible ».
« Le nom de Lara vient bien sûr du roman Le docteur Jivago par Boris Pasternak. Pour la génération de Stephan, il se peut que ce soit davantage Lara Croft, un personnage totalement à l’opposé de la petite Lara ».